Étrange effectivement. Depuis jeudi dernier -ça va faire une semaine-, je cherche comment attaquer cette bafouille à propos d’un flim qui m’a bien plu, d’un type que j’adore (David Fincher), mais qui au final et après mûre réflexion, laisse un peu sur sa faim.
J’entends d’ici les rabats joie qui vous diront que c’est trop long. Je suis d’accord, 2h40 c’est trop long. Même si c’est d’une vie que l’on parle. Et ce n’est pas tellement de ce point de vue que j’utilisais l’expression « rester sur sa faim ». Non, je visais plus le développement des personnages, leurs mobiles. Je devrais peut-être commencer par vous proposer les bases de cette histoire – si vous n’adhérez pas au postulat de base, n’entrez même pas dans la salle, hein -. L’histoire qui nous est contée ici est celle de Benjamin Button (Brad Pitt, à partir du moment où son personnage peut parler), né avec le faciès et les os d’un vieux de 80 piges, et qui au lieu de passer l’arme à gauche va grandir et rajeunir sous vos yeux, éberlués par la qualité des maquillages et autres effets spéciaux. Il rencontrera bien sûr l’amour, incarné par la belle et froide Cate Blanchett -à partir du moment où son personnage est majeur-. Voilà voilà. Pour résumer, c’est un chassé croisé de 2h40, où nos protagonistes vont d’abord être amis contrariés par la différence d’âge apparente (Papy Pitt, 70 balais, P’tite Cate, 10 ans), puis un peu gênés, puis plus du tout quand ils ont à peu près le même âge, et après je ne vous en dit pas plus, sinon à quoi bon.
Commençons par les gros points positifs. Les acteurs. Déjà ensemble dans Babel – qui gagne vraiment à être revu quand on a juste bien aimé la première vision – Brad Pitt et Cate Blanchett sont une énième fois parfaits. Juste parfaits. Ni plus, ni moins. Le métier quoi. La photo, tout bonnement merveilleuse. La réalisation. David Fincher n’a plus grand chose à prouver depuis un moment. C’est parfaitement mis en scène, manque juste un petit grain de folie, un je ne sais quoi qui donnait à ses œuvres précédentes ce ton si particulier. M’enfin c’est quand même classieux. On sent que c’est lui, ça se sent à l’image, mais voilà. C’est propre, très propre … Peut-être trop. Voilà je l’ai écrit. J’ai déjà dit tout le bien que je pensais des maquillage et des effets spéciaux, inutile que j’y revienne.
Un point sur lequel je suis ici indécis, c’est le procédé narratif utilisé. Et la grande question qui en découle sera « est-ce que David Fincher cherche l’Oscar ? » Parce que bon, le coup de la vieille qui raconte son histoire d’amour de gamine à sa petite fille sur son lit de mort, et bien, j’ai vu ça en salle une fois, attiré par le nom d’un réal’ que j’aimais bien, James Cameron, et ce flim, qui a par la suite remporté la bagatelle de 11 statuettes, c’était tout simplement Titanic. Rien contre l’idée hein, mais c’est juste que la ressemblance m’a de suite choqué. Même si c’est un bien grand mot. Ajouté ce petit mimétisme à la réalisation moins « recherchée » du petit David, et je pense que vous obtenez un flim intergénérationel, assez classique, qui peut aussi bien plaire à la ménagère de moins de 50 ans, à la midinette, au jury des oscars ou au quidam qui passe.
Autre hommage gentiment appuyé qui fera sourire par chez nous, un passage à Paris, où on pourrait croire que Jean-Pierre Jeunet a dirigé la seconde équipe, dans un plus pur style Amélie Poulain. C’est mignon, c’est naïf, ça fait pas mal aux seins.
Finalement, c’est aussi un flim qui devrait vous faire réfléchir sur cette bonne vieille sentence latine qui vous hante les lendemain de cuite, carpe diem. C’est bien beau de profiter, mais c’est quand même sacrément égoïste, aussi, on en vient par moment à se détacher des personnages, limite à s’en contrebalancer méchamment. Il y a un long passage dans le flim, où les personnages se rejettent mutuellement parce que ceci, parce que cela.
Vous pourrez à ce propos vous faire votre idée sur le dénouement. Triomphe de l’égoïsme pour certains, juste et respectable pour d’autres.
Reste un très beau flim, beaucoup, beaucoup trop long, sans doute trop classique dans sa forme pour un sujet aussi « fantastique » pour emporter une complète adhésion. Fincher a été plus inspiré et pourtant il devrait remporter une statuette, à moins que Danny Boyle et Slumdog Millionaire ne s’invitent à la fête.
J’ai aimé, c’est un fait. Je le reverrai sans doute sans déplaisir, mais dans un petit moment. C’est incontestablement le flim de David Fincher que j’ai le moins apprécié dans sa flimographie, que je vous invite à redécouvrir de ce pas. Vous pouvez même commencer par l’avant-dernier, un vrai chef-d’oeuvre de polar 70’s pour le coup, Zodiac. Les autres pour mémoire : Alien3, Se7en, The Game, Fight Club, Panic Room et donc Zodiac. Du tout génial.
Je plussoie, un très beau film, mais peut être trop académique pour un mec comme Fincher. Enfin, il a le droit de vouloir une statuette, sont pas nombreux à n’avoir jamais essayé de rentrer un tantinet dans le moule d’Hollywood pour obtenir un joli serre livre doré…