J’avais entendu et lu à peu près tout et son contraire à propos du film d’Alejandro González Iñárritu. Bien que récompensé du prix de la Mise en Scène au dernier Festival de Cannes, le quatrième long-métrage du Mexicain est loin de faire l’unanimité…
Du coup j’y suis allé sans trembler, avec juste en tête les commentaires de la pseudo critique ciné de Paris Première vu quelques heures plus tôt : « C’est du Lelouch ». Diantre, le gars qui a réalisé le très très bon 21 grammes a pondu un film digne du grand Claude. Ouache. Ca doit valoir le coup d’oeil.
Il s’agit donc de trois histoires « imbriquées ». La première se déroule au Maroc, où Cate Blanchett et son Brad Pitt de mari cherchent à resouder leur couple. Leur route va malheureusement croiser celle d’une balle, tirée par deux gamins. Loin de là, aux States, leurs adorables bambins sont sous la garde de leur bonne mexicaine … qui va les emmener au mariage de son fils au Mexique justement. De l’autre côté du globe, au Japon, une jeune fille sourde muette ne parvient pas à se faire déboîter. La vie est dure et chacun va dérouiller dans ce -trop- long effort.
C’est donc long. 2h10 pour un film qui aurait sans doute pu et du faire tout au plus 1h45.
L’histoire nippone, j’en suis le premier désolé, avec un peu de recul, ne sert pas à grand chose dans le contexte du film, car au final beaucoup plus fine et interessante que les deux autres. Si c’était pour montrer les difficultés des sourds muets à se faire comprendre -entendre- et donc à rencontrer l’âme soeur, il eut été préférable de faire un film à part, d’autant que pour le coup le lien avec les autres histoires est bidon -tout comme les montages photos qui nous sont montrés dans le film (sans dec’ j’aurais pu les faire moi-même)-, et du fait d’un traitement superficiel et clippeux , l’intérêt n’est pas énorme pour le spectateur, à moins qu’il n’aime les castors (NdMarshall: …et Earth, Wind and Fire ! Let’s Groove Toniiiiight).
Ce segment aurait simplement mérité un traitement à part, car tellement moins basique que les deux autres où finalement les gens sont perdus dans un pays qui n’est pas le leur… contrairement à la sourde muette, incapable de se faire comprendre dans son propre pays, et de son propre père, et s’appuie donc sur la provoc’ pour communiquer. Un beau sujet gâché pour moi.
Reste pour cette partie de bien jolis plans de Tokyo by night et de formidables acteurs -ce qui est valable pour les deux autres aussi-.
C’est beau le Maroc. Dommage que les gens ne soient pas particulièrement aimables avec les étrangers, que les médecins soient denrées rares, que les enfants se masturbent au milieu des chèvres et aiment à mater leurs soeurs nues et complaisantes, et que la police ne soit pas d’une grande courtoisie … Je doute qu’Iñárritu bosse pour l’Office du Tourisme marocain -ce qui ne l’empeche pas de remercier le Roi dans les crédits-, tant l’image renvoyée du Maroc n’est guère positive. Reste -encore- des acteurs de grande classe avec en premier lieu les deux ptits snipers -presque- involontaires et leur père, absolument impec’. Brad Pitt et Cate Blanchett sont parfaits et crédibles comme il faut. On saluera le boulot du chef op pour les somptueux paysages marocains.
Ah le Mexique. La frontière Americano-mexicaine, et ses légendaires douaniers tatillons. Là encore de bien sympathiques paysages, de bien décapsulables poulets, et un mariage où tout le monde danse et chante… et où deux ptits bouts et une gentille madame vont déguster à cause d’un imbécile.
Un film qui s’appelle Babel ne pouvait traiter que de communication. Tous ensemble: « Oooooooooooooooooh ?! ». Force est d’avouer que si le trait est parfois un peu trop poussé, voire poussif, le message passe et l’émotion est là.
Grâce en soit rendue à des acteurs toujours impec’, parfois épatants. La mise en scène, parfois caméra à l’épaule type reportage ne rend pas toujours justice aux sublimes décors et à la lumineuse photo de Rodrigo Prieto. Le tout soutenu par l’envoutante musique de Gustavo Santaolalla déjà ouïe dans Révélations.
Babel n’en reste pas moins un très bon film, du genre qui fait un tant soit peu réfléchir sur le monde actuel où comment un mal peut parfois devenir un bien. D’un choc peut naître quelque chose de bien… ou une merde pas possible. Iñárritu a choisi sa voie. Après tout Everybody loves a happy ending (ou presque) …